vendredi 2 janvier 2009

Imitation et représentation

Mais cette production n'est pas obligatoirement de nature volontaire. Contrairement aux autres productions humaines, l'acte de création se situe le plus souvent hors du champ de la conscience. Il nous permet d'accéder à une communication du spirituel, de l'intemporel, de l'universel. Nietzsche pense également que l'art doit servir à masquer ou à embellir tout ce qui est laid dans la nature humaine[17]. Pourtant, aujourd'hui, certains arts nés de la modernité, tel le cinéma, cherchent autant à embellir la nature humaine, qu'à mettre en évidence toute sa noirceur dans l'espoir peut être d'en extraire les germes de l'incompréhension et de l'intolérance.

Le cinéma, en limite de l'art, donne à voir des crédibilités quotidiennes, qui mettent à jour, comme le roman, mais en plus restreint, une expérience humaine que nous ne saurions découvrir autrement.

Cette logique conduit l’art vers une nécessité, vécue de l’intérieur par l'artiste. La musique, plus que « l’art d’organiser les sons » reflète l’expression d’une entité sonore « autre », d’une forme irréelle et non conceptualisable de la communication ; elle est une imagination totale, qui réunit à la fois de nouvelles représentations et une conception neuve de leur construction. Comme les autres arts, elle exprime le rationnel et l'irrationnel, mais en s'écartant du mythe ou de la magie.

Tous les processus créatifs opèrent, par l’esprit même qui les guide, une catharsis qui garantit un dépassement des limites posées à la connaissance du monde. La symbiose sensorielle qui nourrit l’action créatrice n’est que la forme élémentaire de la représentation qui infère l’imaginaire.

En tant qu’approche différente, plus tournée vers l’esprit que vers la pensée, l’art doit inéluctablement déboucher sur le prolongement de l’œuvre d’une nature dominatrice et confinée à des transformations évolutionnistes. Tentant de s’affranchir de ces limites de la pensée humaine, l’art retrouve la substance spirituelle, quasi mystique, quasi magique, de la création. Cette volonté d’apaiser notre soif de connaissance n’est pas obligatoirement malsaine. Mythe et magie ne sont pas foncièrement des échappatoires aux manques de rationalité des événements qui nous entourent, même s’ils sont, pour certains, des aveux de faiblesse, des limitations transfigurées.

Ils peuvent parfois marquer aussi la recherche d’une spiritualité absente. L’art en revanche est lui toujours une nécessité d’exprimer le monde de cette façon-là. Il ne cherche pas à remplacer la réalité par une autre entité de meilleure consistance ; il ne cherche pas non plus à transgresser des limites inhérentes à notre nature, mais il cherche à les transcender. L’art cherche à utiliser le monde des sens pour pénétrer dans un monde de l’esprit, ou peut-être même dans celui de l’âme. Ce faisant, l’art cherche l’immanent derrière le permanent. Il essaye de prouver que le potentiel humain ne se réduit pas à la transformation, mais qu’il a conquis la dimension de la création.